Roger Mené nous a quittés…
Crédit photo : Michel HOUET
Pas facile pour moi de rendre hommage à Roger Mené sans aborder des choses très personnelles, tellement il a été influent sur le cours de ma vie professionnelle.
Il y a juste 30 ans, il m’engageait comme rédacteur-en-chef de « La voix de l’Union », ancêtre de « UCM Magazine ». Malgré mon jeune âge, 27 ans à l’époque, il m’a directement accordé sa confiance et fait de moi d’abord son proche et fidèle collaborateur, ensuite un administrateur UCM quand j’ai quitté ma fonction pour reprendre une PME. Il était comme ça : tout le monde avait sa chance, mais une seule…
A l’époque, nous avons sillonné pendant de longues soirées de nombreuses villes francophones où il prenait la parole avec un seul objectif : rassembler et unir ceux qui constituaient l’espoir économique de notre région après le déclin de nos grandes industries.
Aujourd’hui, UCM est un acteur reconnu, écouté, consulté à tous les niveaux de pouvoir et c’est incontestablement en grande partie grâce à l’action de Roger Mené que UCM a aujourd’hui cette crédibilité pour défendre et représenter le monde des indépendants et des PME. « Indépendant et Unis » est la devise actuelle de UCM et ce n’est pas un hasard…
Cette réussite est la conséquence d’une personnalité hors du commun. Sensible et délicat, Roger Mené pouvait être un adversaire redoutable : cœur sur la main d’un côté et poing sur la g… de l’autre. Il était comme ça ! Il aimait ou il n’aimait pas… et c’était difficile de passer d’une catégorie à l’autre. D’une fidélité indéfectible en amitié, il aimait les gens de convictions même si elles étaient différentes des siennes. Je pense à Urbain Destré, chef de file de la FGTB à l’époque, Louis Michel, Jean Gol, Guy Mathot (de Seraing comme lui) ou encore André Cools avec qui il avait fait une partie de sa jeunesse. Quelques jours après l’assassinat de ce dernier, il m’avait demandé d’aller avec lui se recueillir à l’endroit de son assassinat avec pudeur et émotion, loin des caméras.
Roger Mené, c’était aussi l’homme des formules choc, souvent improvisées sur un plateau TV lors d’un débat ou en pleine concertation sociale comme l’a rappelé Peter Timmermans le patron de la FEB à l’occasion d’un récent hommage. J’en retiendrai quelques-unes : « l’emploi c’est nous ! », « la pénétration syndicale dans les PME c’est non-négociable » (au groupe de 10), « celui qui crée de l’activité et de l’emploi en risquant l’argent qu’il a investi dans son affaire doit être reconnu », … Au-delà des formules, il avait cette capacité à « flinguer » un adversaire avec sourire, gentillesse, élégance et sans arrogance. Cette « bonhommie » avec l’air de ne pas y toucher lui valait un respect unanime tant parmi ses partisans que ses opposants et ce quel que soit le cénacle. Roger Mené était aussi un homme de parole. Un accord verbal valait mieux que n’importe quel contrat.
Un jour il m’a montré ses cahiers d’école primaire : une calligraphie impressionnante un soin comme je n’ai jamais vu et pas une rature de la première à la dernière page. L’exigence et la perfection, c’était ça aussi Roger Mené. Il n’est d’ailleurs pas étonnant qu’au groupe des dix, c’était lui qui rédigeait les accords dans un cahier qui ne le quittait pas, en faisant la synthèse des positions du banc patronal et du banc syndical. Ses origines modestes et son souci du travailleur, fusse-t-il indépendant, lui permettaient de rapprocher les points de vue et quand il y avait blocage, il trouvait toujours la bonne boutade pour détendre l’atmosphère et rouvrir les débats.
Roger Mené était un travailleur acharné. En 30 ans, je ne l’ai pas vu prendre un jour de vacances. Il avait une passion, que nous partagions, pour les belles voitures et pour les nouvelles technologies. A tel point que chaque fois qu’un nouvel IPhone sortait, le sien se mettait subitement à bugger…
Conscient de la nécessité du soutien financier aux PME et aux indépendants, il a été un acteur majeur en la matière. D’abord, en créant et en présidant le Fonds de Participation qui a financé des dizaines de milliers d’indépendants, mais aussi au niveau régional en présidant de nombreux comités de crédits aux PME. Son expertise en la matière était unanimement reconnue.
Personnalité attachante et reconnue, il a, pour son action, été, en 2001, anobli par le Roi au titre de Baron; titre qu’il n’arborait jamais par pudeur et modestie, mais combien méritée.
Marc VILET,
Porte-parole UCM Province de Liège